« Ce qui est irréductible dans cette musique provient de son désir de changer le monde. Un désir manifeste et simple, mais qui dessine une histoire infiniment complexe. Ce désir commence avec le besoin urgent de vivre non pas comme objet mais comme sujet de l’histoire – de vivre comme si quelque chose dépendait réellement de notre action – et ce besoin urgent débouche sur un champ libre. »
Greil Marcus, Lipstick Traces
Coup de tonnerre dans un ciel serein ou point de cristallisation de multiples contextes :
d’où nous vient mai 1968, où et comment résonne-t-il ? À quelles chronologies le raccorder ?
Marchant dans les pas de Greil Marcus, essayiste du rock, auteur d’une généalogie culte
de la subversion (Lipstick Traces) et invité-star de notre remémoration non-commémorative,
le Nouveau théâtre de Montreuil remonte les fils des histoires possibles de 68.
Une autre histoire s’ouvre alors, débordant le cadre strict des chronologies attendues,
pour réveiller l’inconscient culturel et les tonalités plurielles de mai. Des avant-gardes
dadaïstes aux dérives situationnistes jusqu’au cri de Johnny Rotten – le charismatique leader
des Sex pistols, les résonances sont nombreuses et vibrantes, militantes, politiques,
poétiques, internationales, artistiques et bien sûr musicales…
Au fil de ces années, la musique tisse en effet l’un des fils conducteurs de la contestation.
C’est ce fil subversif et révolté, sensible et festif que nous suivrons tout particulièrement,
guidés par le souci d’une histoire transversale qui coule dans les temps présents comme
elle irrigue, tout au long du XXe siècle, les gestes de ceux qui se mobilisent contre l’ordre
dominant.
Du 2 au 5 mai, Mathieu Bauer et Sylvain Cartigny adaptent le film de Fellini,
Prova d’Orchestra, avec les quatorze comédiens de la promotion sortante de l’ERACM et les
musiciens de l’orchestre de scène du Nouveau théâtre de Montreuil. Répétition d’un orchestre
enregistrée par la télévision, ce film, réalisé en 1978, met en scène la révolte des
musiciens contre leur chef, et acte à sa façon la fin d’un cycle ouvert par les événements
de 68.
Dans la lignée des journées « Agora » initiées en 2017 autour de la Grèce ou des élections
présidentielles, le Nouveau théâtre de Montreuil renouvelle ce type de rendez-vous autour
de Mai 68, les vendredi 4 et samedi 5 mai. Aux manettes, Sylvain Cartigny, musicien et compositeur,
et Thomas Pondevie, dramaturge, tous deux artistes associés au théâtre.
Au programme de ce week-end, il y aura de la musique live avec Greil Marcus et son histoire
underground du XXe siècle, des performances (interventions en texte et en musique par
trois comédiens), des ateliers sérigraphiques avec Les Démons, un débat sur la désobéissance
mené par l’association ATTAC… Les Éditions Allia et leur directeur Gérard Bérreby
seront également présents, à l’occasion notamment de la réédition en avril 2018 de Lipstick
Traces.
Enfin c’est en musique tout naturellement que nous terminerons ensemble ces soirées,
autour d’un Dj set de circonstance, virevoltant et engagé.
