Il est des contes merveilleux qui s’adressent aussi bien aux enfants qu’aux adultes : aux premiers ils apprennent à grandir, aux seconds ils apprennent à vivre. Il en va ainsi de La Flûte enchantée, opéra testamentaire de Mozart, qu’il acheva quelques semaines avant sa mort.
Ayant échappé aux griffes d’un serpent géant, le prince Tamino se voit remettre une flûte enchantée par trois dames à la solde de la Reine de la nuit. Avec son compagnon, l’oiseleur Papageno, il part à la recherche de la princesse Pamina, prisonnière du Grand-Prêtre Sarastro et de ses mystérieux rites de passage. Mais les apparences sont trompeuses et nos aventuriers de fortune devront apprendre à distinguer le bien du mal, l’ombre de la lumière, le soleil de la nuit.
Comment insuffler dans notre quotidien la magie de l’opéra ? Comment surprendre les spectateurs au milieu de leur vie ? Pour la metteuse en scène autrichienne Anna Bernreitner, faire tomber les murs est une évidence : à la tête du collectif artistique OPER RUND UM, elle a monté des spectacles dans des lieux aussi insolites qu’un pub, une piscine, une serre tropicale ou un supermarché. Dans le fabuleux opéra initiatique de Mozart, la peur a été son lapin blanc : peurs bleues, peurs enfantines, peurs qu’instrumentalisent les dirigeants pour contrôler les peuples, peur du silence et de la mort, peur du feu qu’il faut dompter pour devenir l’auteur de sa propre histoire.
Héritier des Lumières, Mozart rêvait de composer une œuvre qui plairait aussi bien aux savants qu’aux voituriers : à l’image de cette flûte capable de charmer les animaux de la forêt. De l’ouverture électrisante au tomber de rideau, sa musique court après son but : rendre la Terre pareille au Ciel et les humains égaux des dieux. Un but qu’elle finit par toucher : lors du chœur final, le compositeur parvient à créer une utopie musicale. Alors La Flûte enchantée traverse la nuit et, 230 ans plus tard, n’en finit pas d’éclairer notre monde.