Taim, trente ans, est admis à l’hôpital, sans connaissance. Il a été passé à tabac, après avoir mystérieusement disparu en traversant l’un des check points de forces de sécurité qui parsèment Damas. Devant cette nouvelle épreuve, la famille, dont le père a été emporté quinze ans plus tôt d’une mort tragique aux accents de scandale, est particulièrement démunie. Les douloureux secrets que réveille ce souvenir astreignent chacun à de profondes mutations. Une année durant, Taim, toujours dans le coma, ressent simultanément les changements parmi les siens, et ceux de sa ville, Damas, devenue un endroit étrange, cruel. C’est depuis son état, une retraite impuissante, que cette tectonique des émotions nous est donnée à ressentir.
Omar Abusaada a inventé un traitement singulier du théâtre, assorti de vie réelle, pour nous plonger dans l’intimité de ceux qui subissent l’actualité en Syrie, à rebours de la masse anonyme, relayée par les médias. Dans son dernier spectacle, Antigone of Shatila, une trentaine de femmes syriennes et palestiniennes du camp de Chatila témoignaient de leur traversée de réfugiées en se projetant dans la figure d’Antigone. Cette nouvelle collaboration avec le bouillonnant auteur Mohammad Al Attar confirme l’étoffe de leur binôme. S’ils s’affranchissent ici du théâtre documentaire pour retourner à la fiction, c’est sans quitter la question qui les occupe. Le coma, c’est aussi l’histoire de la Syrie d’aujourd’hui, cette zone grise entre la vie et la mort, entre l’espoir et le désespoir.