Il y a une solitude sociale et il y a une solitude mentale. On peut être seul à l’intérieur de soi, dans le froid de l’âme, comme on peut être seul à l’intérieur d’une foule, d’une famille ou d’un couple, avançant sur la brèche incertaine entre mélancolie et dépression. Alors s’organise une lutte contre soi et contre le monde pour reconquérir le désir de vivre, et aucune aide n’est évidente. C’est le sujet d’En manque, une étude théâtrale, plastique et chorégraphique de Vincent Macaigne pour acteurs, danseurs et circassiens. Comme pour des projets précédents, il part d’un texte qui sert de trame et qu’il réécrit dans l’action de la répétition.
Vincent Macaigne met en scène une femme aux prises avec la mélancolie, état qu’il prend dans son sens étymologique de «corps mort porté en soi» – la mélancolie de ceux qui ne renoncent pas à l’amour véritable, peut-être. Son mari ou amant hésite entre l’aider, l’aimer et fuir, et seul son enfant la sortira finalement de sa torpeur après qu’elle se fut débattue avec quelque chose qui la refermait sur elle-même. Vincent Macaigne ne raconte pas un drame intérieur ou psychologique, pas plus qu’il n’explique sociologiquement un état d’être: il crée une performance théâtrale comme une lutte contre le monde, contre la vie, pour la vitalité et le désir.