« Ce qu’on ressent très fort en voyant une pièce des Chiens de Navarre, c’est précisément ce désir comme gonflé à l’hélium de recharger la scène, de la boursoufler et de la faire par instants exploser. Au cœur de la banalité, la scène s’augmente de tous nos espaces les plus imprévisibles, diffractions de nos fantasmes, métaphores sur-jouées de nos pulsions, quelque chose comme le surgissement de nos désirs les plus saillants et les moins calculés. D’où cette place laissée à l’improvisation, dans l’élaboration du travail bien sûr, mais aussi dans la réalité de ce à quoi nous assistons : autour d’un scénario réduit à son plus simple appareil, gravitent les situations les plus outrées, les déchaînements ponctuels, les fatigues extrêmes et les violents déchirements, qui participent tous de cet hyper-présent. Ce refus de fixer une forme et de « re-présenter » soumet le spectateur à l’énergie suicidaire de propositions plus explosives les unes que les autres, et dont le résultat est souvent la pure hilarité, ou bien l’ébahissement, celui qu’on éprouve devant les folies futuristes ou dadaïstes. »
Tanguy Viel
pour le Théâtre de Gennevilliers
CDN de création contemporaine