À l’occasion de leur exposition personnelle, le duo Berger&Berger s’intéresse au lieu dans ses différentes composantes. Son architecture, les allers-retours qui se créent entre l’espace scénique, les espaces d’expositions ouverts sur le paysage et sur la ville.
Les œuvres du duo Berger&Berger, qu’elles relèvent de l’architecture, du design, de la scénographie ou des arts plastiques, engagent les propriétés physico-chimiques de la matière autant que la perception.
Elles ont souvent pour point de départ une amorce narrative qui puise dans des références à la croisée des arts, sciences et techniques du XVIIIe siècle et du XIXe siècle. Cette narration joue elle-même avec les bouleversements survenus dans l’histoire de la perception.
Le phénomène lumineux dans sa capacité à modifier un état de conscience est à l’origine de Sommeil Nerveux (2013). La pièce convoque à la fois les arts décoratifs et les neurosciences pour évoquer cette expérience de perception qu’est l’hypnose. Réalisée avec l’aide du philosophe et hypnothérapeute François Roustang, cette sculpture a été produite dans la verrerie de Meisenthal, célèbre pour sa production de boules de Noël comme pour avoir servi de laboratoire à Emile Gallé, chef de file de l’Ecole de Nancy. La sculpture joue sur un état de perception à la limite de l’auto-suggestion.
Or, c’est également d’allers-retours entre perception et persuasion dont il question dans la série Trévans (2015) qui met en tension image et texte. Les photographies de la série Trévans (2015) rappellent les clichés à caractère géologique ou géographique réalisés lors d’expéditions photographiques. À la légende descriptive donnant des indications géographiques et géologiques succèdent des relevés climatiques (perception du climat, température, hygrométrie) et physiologiques (fréquence cardiaque) qui engagent la subjectivité et créent des allers-retours entre ce qui est de l’ordre du visible et ce qui relève de la suggestion. Dans ce moment de frottement entre l’image et le texte, suggestion, persuasion et perception influent sur le spectateur pris à parti.
D’autres œuvres imaginées spécifiquement pour le théâtre d’Hérouville sont également présentées. Le titre, court fragment emprunté au roman d’Alain Robbe-Grillet Dans le Labyrinthe, pourrait tout aussi bien qualifier les jeux perceptuels des Berger&Berger.
Audrey Illouz