Pour la première fois dans l’histoire, plus de la moitié de la population mondiale vit dans une ville ; il y a cinquante ans, ce n’était qu’un tiers et huit personnes sur dix vivront dans une zone urbaine dans un siècle. La ville est l’espace de la modernité et le lieu de notre condition contemporaine. Cette ville, nous l’habitons, nous la traversons, nous la quittons parfois pour mieux la retrouver, mais nous la regardons peu. Il y a tant de situations, de hasards, d’échanges ou d’incidents que nous n’avons pas vus, de petites ou grandes catastrophes qui se trament et que nous avons ignorées. Elle est aussi l’espace de la jeunesse et du futur, ou de l’absence de futur.
C’est pour témoigner de la ville contemporaine et pour confronter l’espace confiné du théâtre au monde extérieur que Daria Deflorian et Antonio Tagliarini, rejoints par le plasticien Cristian Chironi, entreprennent Il cielo non è un fondale. A la façon de Peter Handke ou d’Annie Ernaux, leur art de la présence et de la parole s’immisce dans l’espace fragile, intense et incertain qui relie la fiction au réel. Ils explorent la mémoire déposée en chacun de nous par l’expérience de la ville et la vitalité de ses habitants. L’ici et maintenant de la représentation révèle alors quelque chose de l’ailleurs et de l’autre. Les portes du théâtre sont grandes ouvertes à l’air vif de la vie urbaine et la pièce décrit avec acuité les tensions, transports et renouvellements qui font la ville, notre espace commun et partagé.