La Collection est une pièce fascinante et sombre. Le texte distille le poison du mensonge. James veut savoir la vérité sur ce qui s’est réellement passé une nuit dans un hôtel de Leeds entre Stella, sa femme, et Bill. Bill vit chez Harry à Belgravia, un quartier huppé de Londres, Stella et James à
Chelsea, le quartier des artistes. Quelle est la vraie nature du lien qui lie Harry et Bill ? Que cherche vraiment James ? Que désir Stella ?
Quels réglages passionnels guident chacun de ces personnages entre fantasme et jalousie ?
Pinter nous conduit sur de multiples pistes comme autant de départs de fictions… une collection. Car tout est fragment dans cette pièce.
Mélange inédit de réalisme et d’abstraction, elle ne dit des personnages que l’essentiel qui sert l’action. L’intrigue emprunte sa forme au roman noir. Depuis 1962, date de l’écriture, le développement d’Internet, l’invention des réseaux sociaux, l’arrivée fulgurante des outils numériques et des téléphones portables et des réseaux sociaux a changé notre rapport à la connaissance et à la vérité. La surveillance, le contrôle, les algorithmes ont envahi nos vies. La transparence !
Nous sommes censés tout voir, tout entendre, tout savoir en temps réel grâce aux nouvelles technologies, et pourtant… Plus la vérité semble offerte, plus le mensonge est colporté. Les fake news, les manipulations en tout genre… Plus les techniques de dématérialisation progressent, plus la vérité semble nous échapper. Une autre vie, la seconde, celle de notre existence virtuelle, nous suit comme une étoile ou comme une ombre. Alors que deviennent aujourd’hui ces personnages créés par Pinter il y a plus de cinquante ans, qui semblent flâner dans la ville moderne, à l’avant-garde de nos modes d’existences ?
Ludovic Lagarde