« Le champagne, c’est un peu mon bleu de travail », affirme l’un des protagonistes de ce spectacle très librement inspiré de Parade, célèbre chorégraphie de Léonide Massine pour les Ballets russes d’après un livret de Jean Cocteau, rideau de scène signé Pablo Picasso et musique d’Erik Satie. Loin de reproduire ce ballet créé en 1917, Marco Berrettini en renverse l’argument, installant les huit danseurs dans l’espace d’une soirée de gala vue depuis les coulisses.
Cette situation paradoxale, pour ne pas dire inconfortable, dans laquelle sont placés les interprètes est pour le chorégraphe un moyen de jouer avec les codes du glamour et de la célébrité, dans une société où le spectacle est désormais partout. En ce sens, No Paraderan, recréé aujourd’hui seize ans après les premières représentations en 2004, est d’abord une pièce emblématique et subversive sur le désir et la frustration, une mise en abîme vertigineuse des notions d’art et de spectacle, menée de bout en bout avec un humour d’autant plus dévastateur que rôde le spectre de la banalité.
Sur scène, il y a Scott, Bret, Candy, Pearl, Chess, Tiffany, Santiago, Nina, héros qui, comme indiqué dans le titre de cette pièce, « ne paraderont pas ». Merveilleusement campés, avec toutes leurs particularités comiques et leurs différences, par les danseurs de la compagnie *MELK PROD, ils pourraient sortir de quelque émission de téléréalité ou, au contraire, postuler pour y être enfin engagés, tant leur statut semble improbable. Baignant dans un kitsch vaporeux, le spectacle convoque ainsi une atmosphère, entre mélancolie douce et légère ivresse, qui ne déparerait pas chez Federico Fellini.