PICTURES OF GARBAGE & BADJINE, LES ESPRITS DE LA NATURE

[ Vik Muniz et Nicolas Henry / Photo Climat ]
Biennale photographique sociale et environnementale de Paris
Date(s) :  du 24 mars 2022 au 23 mai 2022

Pictures of Garbage – Vik Muniz
« Sebastião, Suellen, Carlão, Magna, Irma, Zumbi and Isis, sont des gens qui ont vécu et travaillé à Jardim Gramacho, (État de Rio de Janeiro) la plus grande décharge du monde. Ils survivent en recyclant tout ce qu’ils y trouvent. J’ai décidé de créer leurs portraits à travers des mises en situation allégoriques, produisant la photo avec leur aide dans mon studio et en utilisant les matériaux qu’ils ont recyclés. Ce magnifique projet m’a donné l’occasion de rencontrer d’incroyables personnalités, vivants dans les pires conditions qui soient. Par ces rencontres, j’ai été mis face à face avec une part de l’existence que je n’imaginais pas. » 

Vik Muniz

Vik Muniz ne fabrique pas des images, il les transforme et nous restitue celles qui hantent notre mémoire collective. Il invente toutes sortes de modes de reproduction étonnants et fantasques, pour que le regard du spectateur devant ses photographies bascule en permanence du sujet à la matière dont il est recomposé, et inversement. Chocolat, confiture, nuages, détritus, poussières, diamants, confettis, caviar, puzzle, ancre, bulles …
Les matériaux utilisés apportent toujours à l’image un supplément de sens, qui ne manque ni d’humour, ni d’intelligence, et révèlent en nous la conscience cachée d’un regard responsable.
Dans le très beau film Waste Land, Vik Muniz montre son attachement à sortir du cercle fermé de l’art, sa volonté belle et obstinée de faire de son œuvre le levier d’un grand projet humaniste pour changer un morceau de monde, modifier les mentalités, et nous amener à l’admiration de la noblesse et la grandeur d’âme des gestes les plus humbles.
Des hommes et des femmes noyés dans un océan de poubelles ramassent et recyclent les restes de notre monde consumériste et insouciant. Les ordures par lesquelles ils rachètent quotidiennement notre piètre conscience morale du devenir collectif est aux yeux de l’artiste une matière bien plus inestimable que le diamant le plus pur.
Dans cette rencontre avec les ‘Catadores’ du Jardim Gramacho, Vik Muniz nous conduit dans un voyage par vents contraires, une traversée de l’ignoble pour toucher au précieux, que ce soit dans l’immersion au cœur de la plus vaste décharge publique du monde, ou dans le temple de la spéculation de l’art qu’est une salle des ventes. Comme un alchimiste, Vik Muniz conjugue des univers incroyablement lointains et donne une ampleur sans précédent à son sens inné de la transformation et du recyclage pour faire surgir la beauté et renaître la confiance en l’homme à l’endroit où on l’attendait le moins.

François Quintin

Badjines, les esprits de la nature – Nicolas Henry
Un hiver, lors d’une résidence, en Casamance, Nicolas Henry a créé la série « Badjines, les esprits de la nature » , des mises en scène avec une équipe d’initiés locaux en collectant tout au long de la côte graines, coquillages, bouts de bois flottés, croyances et récits. Quand il demandé à son équipe Diola comment qualifier les images qu’ils avaient réalisés ensemble, l’esprit venait au centre, mais l’un était du ciel, l’autre de la terre ou de la mer. Ce qui pour lui reflétait des songes et la métaphore d’une harmonie avec la nature était pour eux la matérialisation d’esprits vivants à honorer, cultiver et invoquer dans les différents moments de la vie.
Éclairé par ces visions, il a trouvé refuge dans les vallons sauvages de Bretagne, croisant menhirs, dolmens et mares aux fées pour faire vivre les croyances vivaces et telluriques des forêts de Huelgoat et des vallons perdus de Borderhouat. Une écurie aux centaines de chevaux l’accueillera en forêt de Moulières, et sont chemin arpente depuis les 4 coins de nos territoires.
Pavoiser l’église Saint Eustache offre une présence sacrée à ces esprits de la nature. Cette architecture  abrite la plus haute nef de Paris et a été conçue comme une forêt. Il s’agit ici de (re)mettre la nature au centre du spirituel en écho à l’encyclique « Fratelli Tutti » du Pape François qui nous engage à prendre conscience de la crise écologique et à agir.